LoL : Huni un long chemin jusqu'en finale des Worlds

Retour sur le parcours d'Huni avant sa finale demain contre Samsung et CuVee !

Seung-hoon « Huni » Heo, ce nom vous dit forcément quelque chose. La carrière du toplaner coréen commence, comme beaucoup de jeunes joueurs en attente de leur 17 ans, en tant que partenaire d'entraînement au sein de structures prestigieuses, à l’image de Bdd chez CJ Entus. Huni fait donc partie de Samsung en 2014, jusqu’à la dissolution du roster entier : les joueurs des équipes White et Blue ainsi que les partenaires d'entraînement sont remerciés. Cette décision fait suite à la suppression des équipes soeurs par Riot Games, ainsi que la mise en place d’un nombre maximum de joueurs étrangers par équipe. Il intègre aux côtés de Smeb, Rush, Reignover, Scout et Piccaboo le célèbre groupe de tryout de SKT en septembre 2014, mais n’est pas retenu par la structure.

Explosion chez Fnatic

L’histoire d’Huni aurait pu s’arrêter ici. En effet les rumeurs l'annonçaient comme membre du projet Samsung Red : une équipe composée uniquement de coréen envoyée en Europe avec pour ambition de s’imposer en LCS EU et d’obtenir un quatrième slot aux Worlds pour la Corée. Ce plan faisait écho à l’organisation chinoise LMQ qui avait réussi à se qualifier aux Championnats du monde de la saison 4 en tant que troisième seed des LCS NA. Les changements de l’intersaison ainsi que la mise en place d’une ligue coréenne au format similaire à celui des LCS, la LCK, avec moins d’équipes et donc moins de joueurs, auraient pu empêcher le monde de découvrir le talent du jeune toplaner.

Mais en Europe un certain Yellowstar cherche à reconstruire son équipe. Lui et ses dirigeants veulent intégrer des coréens dans l’équipe, et ils repensent à ce jeune joueur qui les avait massacrés pendant le bootcamp des Worlds 2014. C’est ainsi qu’Huni rejoint finalement l’Europe, accompagné de son indissociable jungler pendant deux saisons, Reignover.

Le parcours atypique d'Huni

Reignover et Huni, un des duos les plus iconiques des dernières saisons

Le toplaner conquit rapidement le coeur des fans par ses moves agressifs, son manque de retenue total en jeu, et sa personnalité particulièrement attachante et atypique, qui brise le modèle un peu trop lisse des joueurs européens. Rookie du split et vainqueur du Spring Split, le jeune coréen découvre la scène internationale moins de cinq mois après ses débuts professionnels, durant le MSI 2015. Devenus célèbres par le fameux « Fnatic will crush and burn » du coach de TSM de l’époque, Locodoco, Huni et ses coéquipiers se qualifient grâce à leur victoire sur l’équipe des LCS NA. La demi-finale qui les opposent à SK telecom T1 est resté la série la plus serrée entre une équipe occidentale et une coréenne, jusqu’au quart de finale entre Misfits et SKT deux ans et demi plus tard, mais demeure entachée d’un bug qui, lors de la cinquième manche, tue Reignover et prive Fnatic de l’exploit.

Si la déception est grande, la structure européenne voit plus loin (les Worlds 2015 se déroulant en Europe) et se donne les moyens d’y arriver avec le retour de Rekkles au poste d’AD Carry. Ce recrutement permet à l’équipe de réaliser une saison régulière parfaite : la formation termine le split sur un score parfait de 18-0. Puis elle remporte le dernier titre de Fnatic en date, le Summer Split 2015.

Carry principal de l’équipe, deuxième toplaner avec le plus de pourcentage de dégâts de son groupe derrière MaRin (24.5%), Huni enchaîne les performances de haut niveau et s’affirme comme un des meilleurs à son poste. Dans une méta où les tanks tels Maokai, Gnar ou Shen sont légion, le joueur coréen domine ses adversaires avec des mages comme Ekko ou Lulu (Lissandra au Spring Split) et son champion de prédilection Rumble. Ses pockets picks que sont Cho’gath (pour contrer Ryze), Riven ou Jarvan IV le rendent particulièrement imprévisible. S’il a montré des signes de faiblesses pendant la finale contre Origen, Huni s’avance confiant au moment d’entamer le Championnat du monde.

Le début du « tilt »

Les joueurs de Fnatic ouvrent le bal à Paris dans un match qui les oppose aux joueurs d’Invictus Gaming de KaKAO et RooKie. Dans une partie très tranquille et aisée, les champions d’Europe s’imposent avant de perdre coup sur coup contre Cloud9 et ahq e-Sports club.

En proie au doute, la formation se ressaisit avec une deuxième semaine à trois victoires qui leur garantit la première place de leur groupe. Huni enchaîne les très bonnes performances, à l’image de son quadruplé réalisé pratiquement seul contre quatre adversaires lors du match retour face aux représentants de la LPL.

En quart de finale, ils affrontent une autre formation chinoise, EDward Gaming. Le toplaner coréen est plus en retrait et semble en difficulté lorsqu’il doit affronter les deux toplaners phares de la compétition, Fiora et Darius. Mais les performances de Fnatic en tant qu’équipe sont excellentes et la rencontre est facilement remportée 3 à 0.

Mais en demi-finale, GorillA et les KOO Tigers mettent fin aux rêves de titre des européens dans la « bibliothèque de Bruxelles ». En empêchant Reignover de jouer avec sa toplane en début de partie, ce qui constitue la base du jeu de Fnatic, les joueurs de la LCK étouffent la formation européenne pendant que Smeb étrille Huni dans leur duel. Ce dernier termine la dernière partie sur un score de 0/8/5 avec Riven. La très mauvaise performance du toplaner explique en partie la défaite de Fnatic, mais KOO Tigers et la Corée étaient trop forts pour être arrêtés.

Le parcours atypique d'Huni

Huni sous les couleurs d'Immortals

Le 23 novembre suivant, après un mois de silence, Fnatic annonce le départ de son duo coréen. Deux semaines plus tard, il rejoint l’organisation nord-américaine Immortals, qui vient de racheter le slot de Team8 en LCS NA. Les débuts de l’équipe sont au-delà de toute attente, le Spring Split se termine sur un score de 17-1, et l’infernale paire de coréens semble partie pour remporter un nouveau trophée local.

Puis lors de la demi-finale contre TSM naît la légende du Lucian Top d’Huni. Dans une méta où les toplaners très tanky (Poppy, Maokai ou Ekko tank) dominent complètement, le toplaner coréen optera pour Lucian (2/4/4), Gangplank (0/5/0) et Graves (3/4/1). Immortals est défait 3 à 0, Huni est à nouveau pointé du doigt malgré l’excellente saison régulière réalisée. Sa réputation de joueur ne supportant pas la pression, surtout dans des grands matchs, prend forme et le suit jusqu'à aujourd’hui.

Le passage en BO3 pour le Summer Split influence peu Immortals qui ne s’incline qu’à deux reprises, contre TSM, et termine à la deuxième place. Mais l’histoire se répète en demi-finale, contre Cloud9 cette fois : IMT perd 3 à 2, Huni est peu performant (notamment dans les games 3 et 5 durant lesquelles il termine sur le score de 1/8/5 et 1/6/3) et les critiques commencent à pleuvoir. La réputation d’Huni est définitivement ternie après la finale du Regional Qualifier perdue 3 à 1 à nouveau contre C9. Incapable de jouer des tanks, ne supportant pas la pression, uniquement bon en saison régulière, etc… Le toplaner coréen est pointé du doigt par les fans qui l’accuse d’être responsable de tous les torts de son équipe.

Retour en demi-teinte en Corée

À la surprise générale Huni rejoint les doubles champions du monde en titre SK telecom T1 le premier décembre 2016, le lendemain de l’annonce du recrutement de Peanut. Les interrogations sont nombreuses autour de ce choix tant Huni diffère du profil relativement autonome qu’avait ses prédécesseurs, Marin et Duke. Joueur demandant énormément de ressource et d’attention de la part de son jungler, peu efficace s’il est isolé, jouant peu de tank, le choix est contesté, mais c’est dans le rôle de titulaire qu’il commence la saison 7.

En sélectionnant Maokai et Poppy lors de son premier match, Huni prend au dépourvu la plupart des analystes le disant incapable d’évoluer sur ce type de champion. Il réalise d’excellentes performances tout au long du split, même sur les tanks (18 des 33 parties sont jouées avec un tank) et dans les matchs importants comme les Telecom War (Rumble à plus de 80.000 de dégâts dans la troisième partie de la première série). L’arrivée de Profit en milieu de split met cependant la pression sur Huni, que kkOma n’hésite plus à remplacer en cas de mauvais match.

SKT survole le Spring Split et s’impose 3 à 0 en finale. Le toplaner tient largement tête à Smeb et semble en passe de devenir le toplaner complet et talentueux que les fans attendent depuis son départ de chez Fnatic. Le MSI qui suit est une balade de santé pour SKT. G2 Esports parvient à les bousculer au début de la finale, mais Faker et les siens évoluent à un niveau trop élevé pour la formation européenne.

Le parcours atypique d'Huni

Huni avec le trophée du MSI (Crédit photo : LoL esport)

Le retour du Brésil est dur pour les champions en titre de la LCK. 10 jours après sa victoire contre G2, Huni et ses coéquipiers sont défaits 2 à 0 par Samsung. Pas à l‘aise avec la nouvelle méta qu’ils n’ont pas eu le temps de travailler, les joueurs de SK telecom connaîtront un Summer Split particulièrement compliqué dont une série de quatre défaites d’affilée 2 à 0 au milieu de la compétition et une défaite aux Rift Rivals.

De son côté Huni n’arrive pas à faire la transition et perd sa place de titulaire au profit d’Untara. L’ancien de chez Fnatic ne joue que 16 parties durant le split pour un taux de victoire d’à peine 43.8% contre 26 parties et 76% de victoire pour son remplaçant. Huni retombe dans ses travers, à savoir l’instabilité chronique de ses performances, des erreurs grossières en lane et une tendance à l’agression facilement sanctionnable, là où son coéquipier offre plus de stabilité.

Logiquement c’est l’ancien joueur de CJ Entus qui est préféré dans la majorité des matchs des Play-offs, Huni ne faisant son apparition que lors de la troisième partie de la finale, remportée par SKT grâce à la pression mise par son toplaner en splitpush. Malgré la défaite la formation se qualifie pour les Worlds, mais devra laisser un de ses junglers ou toplaners en Corée, Riot limitant à 6 le nombre de joueurs par équipe. Là où beaucoup pensait qu’Untara serait du voyage pour des raisons de stabilité, c’est finalement Huni qui est choisi aux côtés des deux junglers.

CuVee : l’ultime défi

Depuis le début du mondial Huni n’a pas changé, il reste le joueur insouciant qu’il était à ses débuts et qu’il a été durant l’été. La différence est que la formation coréenne s’est adaptée à Huni comme elle l’avait fait avec Duke la saison précédente. En donnant à son toplaner les moyens de dominer sa lane avec ses picks de confort (Jayce, Trundle ou Gnar), SKT s’offre une condition de victoire supplémentaire, comme lors du deuxième match contre C9 où le splitpush d’Huni a remporté la partie presque à lui seul. Huni est ainsi responsable de 26.3% des dégâts de son équipe, le plus haut taux pour un toplaner dans la compétition. S’il ne fait pas (encore) partie des meilleurs à son poste, il n’est qu’à un match de remporter l’ultime trophée de League of Legends. Mais entre lui et la victoire se trouve CuVee, le meilleur toplaner du monde, le joueur le plus stable de Samsung Galaxy depuis les Worlds 2016.

Le parcours atypique d'Huni

CuVee est le dernier obstacle entre Huni et la coupe de l'invocateur (Crédit photo : LoL esport)

Ce dernier possède un profil légèrement différent par sa polyvalence. En effet Maokai est son champion le plus joué cette saison avec 30 picks, mais CuVee reste un duelliste dans l’âme, que ce soit avec Kled, Camille, Gnar ou encore Shen. Son pocket pick des Worlds, Kennen AP, offre certaines possibilités à Samsung en termes d’engage. Son adaptation à la méta (Cho’Gath, Trundle) est également un des points forts de CuVee. Ce dernier présente la meilleure phase de lane de la compétition avec d’excellentes statistiques : différence de golds à 15 minutes (deuxième avec +318), meilleur avantage de farm à 15 minutes (premier avec +14) et plus grosse avance d’expérience au quart d’heure de jeu (premier avec +361).

L’importance du duel toplane se jouera principalement sur l’utilisation des téléportations, le plus gros point faible d’Huni, et sur les picks en eux-mêmes. Car si CuVee présente un profil très complet et solide, il n’est ni un joueur de Jayce, ni de Rumble, les deux picks de prédilection d’Huni. Si le premier champion sera très certainement ban comme l’a fait RNG lors de la demi-finale, le deuxième est peu présent depuis le début de la compétition et pourrait faire son retour pendant la finale. Gnar et Trundle seront des champions à surveiller, tout comme Camille, les deux joueurs appréciant particulièrement ces picks. Enfin le pick Shen sera un atout de taille pour Samsung car l’une des principales faiblesses de SKT depuis le début du tournoi est son incapacité à jouer autour des sorts globaux, adverses comme alliés.

S’il ne fera probablement jamais l’unanimité auprès des fans et analystes, Huni a ce dimanche l’occasion de remporter le titre de champion du monde et d'inscrire son nom à la légende SK telecom. Comme depuis ses débuts chez Fnatic il est peu probable que sa performance lors de cette finale laisse indifférente, que ce soit en bien ou en mal ...
 

 

Le parcours atypique d'Huni
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