Test de Little Nightmares 3 : Supermassive ne parvient pas à raviver la flamme
Il y a des séries qui marquent par leur ambiance, leur mystère, leur capacité à provoquer le malaise sans jamais avoir besoin de crier. Little Nightmares faisait partie de celles-là. Le premier, avec sa fillette en ciré jaune fuyant des créatures difformes dans les entrailles d’un bateau cauchemardesque, avait quelque chose de magique, ou plutôt, de magnifiquement dérangeant. Le deuxième avait confirmé le talent de Tarsier Studios pour transformer le grotesque en poésie noire.
Mais avec Little Nightmares 3, les choses ont changé. Le studio suédois n’est plus là, remplacé par Supermassive Games (Until Dawn, The Quarry). Et si Bandai Namco promettait que la série resterait entre de bonnes mains, le résultat laisse surtout un goût d’inachevé.
Un jeu qui ressemble à Little Nightmares, sans en avoir l’âme
Dès les premières minutes, on a l’impression d’être de retour dans cet univers inquiétant. Les décors, les textures, les sons étouffés : tout est familier. Sauf qu’à mesure qu’on avance, ce sentiment s’effrite. Ce qui faisait la force de la série, ce malaise diffus, cette impression d’être minuscule dans un monde qui veut vous avaler, semble s’être évaporé.
Little Nightmares 3 n’est pas mauvais visuellement, bien au contraire. Mais il est… prévisible. Le jeu empile des situations vues et revues : un désert avec un bébé géant, une femme-araignée dans des couloirs sombres, un vieux clown et sa marionnette dans un cirque. Tout est trop lisible, trop évident pour être vraiment dérangeant. Là où Tarsier jouait sur l’incompréhensible, Supermassive coche les cases du cahier des charges de l'horreur.
La coopération, fausse bonne idée
Le grand changement de ce troisième épisode, c’est l’introduction du mode coop. Deux personnages, Low et Alone, doivent s’entraider pour progresser. En théorie, c’est une belle idée : partager un cauchemar à deux, résoudre des énigmes ensemble, c’est séduisant.
Mais dans les faits, la magie ne prend pas. D’abord parce qu’il n’y a aucun mode local, seulement du online avec un Pass Ami pour inviter un ami. Et surtout, parce que la coop altère complètement le cœur du jeu.
La peur dans Little Nightmares, c’était la solitude. Cette sensation d’être seul face à l’incompréhensible, à la merci d’un monde monstrueux. À deux, tout devient plus prévisible, plus sûr. Et quand on joue seul, c’est pire : l’IA qui remplace le second joueur est capricieuse, se bloque, ne comprend pas les situations… jusqu’à forcer parfois un un retour checkpoint.
Résultat : un jeu pensé pour être joué à deux, mais qui perd toute sa tension dès qu’on ne l’est pas.
Une direction plus “action”, qui dénature le cauchemar
Autre changement notable : Little Nightmares 3 introduit de petits outils de combat.
Low manie un arc, Alone une clé à molette, utilisés pour activer des mécanismes ou… affronter des ennemis. Et là encore, l’intention se retourne contre le jeu.
Le fait même de pouvoir se défendre retire une part essentielle de la peur : celle de ne rien pouvoir faire. Dans Little Nightmares, la vulnérabilité faisait partie de l’expérience. Ici, on perd ce sentiment d’impuissance qui faisait frissonner.
Même les puzzles, autrefois mémorables, deviennent ici anecdotiques. Le jeu s’enchaîne vite, trop vite, et rien ne reste vraiment en tête une fois la manette posée.
Techniquement solide, émotionnellement vide
On ne peut pas reprocher à Supermassive de bâcler la technique : Little Nightmares 3 est beau, propre, bien animé. Les environnements sont variés, les décors regorgent de détails, et les cinématiques sont superbes.
Mais tout cela sonne faux. Derrière la technique, il manque une direction émotionnelle, un propos, une folie.
Tarsier Studios savait transformer des monstres difformes en symboles, des environnements oppressants en métaphores. Supermassive, lui, semble ne chercher qu’à enchaîner les tableaux.
Verdict
Little Nightmares 3 est un jeu correct, mais un mauvais héritier. Il reprend la forme sans en comprendre le fond. Là où la série brillait par sa subtilité et son étrangeté, Supermassive livre une aventure propre, efficace, mais sans âme.
C’est une expérience courte, polie, et agréable à deux. Mais pour ceux qui espéraient retrouver la magie malsaine des deux premiers, la désillusion est grande.
Peut-être faut-il désormais regarder du côté de Tarsier Studios et de leur prochain jeu, Reanimal, pour revivre le vrai frisson des cauchemars. Néanmoins, Little Nightmare III est un jeu qui peut s'apprécier en duo via le Pass Ami.
Note : 6/10
On a aimé :
- Une direction artistique toujours superbe
- Une coopération en ligne accessible via le Friend Pass
- Un rythme fluide et des décors variés
On a moins aimé :
- Une atmosphère qui ne fait jamais peur
- Une IA souvent catastrophique en solo
- L’introduction du combat, incohérente avec l’esprit de la série
- Une aventure courte, sans moments marquants
En bref :
Little Nightmares 3 ressemble à un cauchemar, mais n’en a plus la substance. Supermassive signe un épisode qui, à force de vouloir moderniser, oublie ce qui faisait l’âme de la série.

